Éviction de locataires au Québec : ce que les propriétaires doivent savoir en 2025
L’éviction de locataires est un sujet délicat et fortement encadré par la loi au Québec, surtout depuis l’entrée en vigueur de la Loi 31 et du moratoire de 2024.
Pour les propriétaires et gestionnaires d’immeubles, il est crucial de bien comprendre les règles en vigueur afin d’éviter les litiges. Dans cet article, nous faisons le point sur ce que vous pouvez, ou non, faire en 2025.
Qu’est-ce qu’une éviction au sens de la loi québécoise ?
L’éviction de locataires est une procédure légale encadrée par le Tribunal administratif du logement (TAL), qui permet à un propriétaire de mettre fin à un bail pour des motifs prévus par la loi.
L’évincement d’un locataire ne peut pas se faire de façon arbitraire. Elle doit être appuyée par des motifs précis et suivre une démarche encadrée par la loi.
Éviction vs reprise de logement : deux démarches distinctes
Il est important de distinguer l’éviction de la reprise de logement.
- La reprise de logement permet au propriétaire de récupérer le logement pour y habiter lui-même ou pour y loger un membre de sa famille proche (enfant, parent, etc.).
- L’éviction, quant à elle, est utilisée lorsqu’un propriétaire souhaite transformer le logement de façon permanente, comme dans le cas d’un projet immobilier, d’un changement d’usage ou d’un agrandissement majeur.
Dans les deux cas, la loi exige le respect de délais précis et, dans certaines situations, le versement d’indemnités au locataire concerné.
Ce qui justifiait une éviction de locataires avant le moratoire de 2024
Avant l’entrée en vigueur de la Loi 31 et du moratoire de 2024, plusieurs motifs étaient reconnus par la loi pour permettre l’éviction d’un locataire. Parmi ceux-ci :
- La subdivision du logement : lorsqu’un propriétaire souhaitait diviser un logement en deux unités ou plus.
- L’agrandissement substantiel : en cas de travaux majeurs modifiant la superficie ou la configuration du logement.
- Le changement d’affectation : par exemple, convertir un logement résidentiel en local commercial ou en bureau.
- La démolition : destruction complète de l’immeuble ou d’une section importante de celui-ci.
Peu importe le motif invoqué, l’éviction devait être justifiée par des documents ou un projet concret à l’appui. Dans tous les cas, un avis d’éviction devait être remis au locataire dans les délais prévus par la loi (généralement au moins six mois avant la fin du bail).
Éviction du logement : les changements apportés par la Loi 31 et le moratoire
Adoptée en février 2024, la Loi 31 a introduit plusieurs modifications importantes en matière de logement au Québec. L’un des changements les plus marquants : l’instauration d’un moratoire de trois ans sur certaines évictions, en vigueur depuis le 6 juin 2024.
Cette décision du gouvernement vise à freiner la transformation rapide du parc locatif, notamment dans les grands centres urbains. En encadrant plus strictement l’éviction de locataires, la Loi 31 cherche à protéger les logements abordables et à limiter les pratiques qui contribuent à la pénurie de logements.
Durant toute la durée du moratoire, les propriétaires n’ont pas le droit d’évincer un locataire pour les raisons suivantes :
- subdivision du logement ;
- agrandissement substantiel ;
- changement d’affectation (ex. : convertir un logement en local commercial ou bureau)
Certaines évictions ou fins de bail demeurent possibles si elles respectent les conditions légales :
- Reprise de logement pour y loger le propriétaire ou un membre de sa famille immédiate ;
- Démolition d’un immeuble, avec les autorisations requises ;
- Résiliation de bail pour motifs sérieux : non-paiement, usage non conforme, troubles importants, etc.
Comprendre cette distinction est essentiel pour éviter les refus ou les litiges devant le Tribunal administratif du logement. Avant d’aller de l’avant, assurez-vous que votre projet respecte bien le cadre légal en place.
Procédure à suivre pour évincer un locataire
Lorsqu’un propriétaire est légalement autorisé à procéder à l’éviction d’un locataire, il doit suivre une procédure rigoureuse établie par le Tribunal administratif du logement (TAL). Ne pas respecter cette procédure peut entraîner un refus, voire des recours de la part du locataire.
Voici les principales étapes à respecter pour que l’éviction soit valide aux yeux de la loi.
1. Remettre un avis écrit conforme
Le propriétaire doit transmettre un avis d’éviction écrit qui contient les éléments suivants :
- le motif de l’éviction (reprise, démolition, etc.) ;
- la date prévue de la fin du bail ;
- une mention du droit de contestation du locataire devant le TAL.
L’avis doit être remis par écrit (idéalement par huissier ou en courrier recommandé pour preuve) et doit être signé. Il est conseillé de conserver une copie de l’avis ainsi que la preuve de réception.
2. Respecter les délais légaux
Le délai pour envoyer un avis d’éviction dépend du type de bail. En règle générale, l’avis doit être envoyé :
- au moins six mois avant la fin du bail pour un bail d’un an ;
- un mois avant pour les baux de moins de 6 mois ;
- trois mois avant pour les baux à durée indéterminée ou de plus de six mois.
Exemple : pour un bail qui se termine le 30 juin, l’avis doit être transmis au plus tard le 31 décembre précédent.
3. Attendre la réponse ou la contestation du locataire
Le locataire dispose d’un délai d’un mois après la réception de l’avis pour accepter ou contester l’éviction.
Si aucune réponse n’est reçue dans ce délai, cela est considéré comme un refus implicite. Le propriétaire devra alors présenter une demande au TAL pour faire valider l’éviction.
4. Déposer une demande au Tribunal administratif du logement (si contestation ou refus)
En cas de refus du locataire (exprès ou implicite), le propriétaire doit déposer une demande d’autorisation auprès du TAL. C’est ce tribunal qui tranchera si l’éviction est justifiée ou non, en analysant :
- le projet invoqué ;
- les preuves déposées (plans, documents, permis, etc.) ;
- le respect des délais et conditions.
La décision du TAL peut autoriser l’éviction, l’interdire, ou imposer des indemnités supplémentaires au propriétaire.
Attention ! Même si le projet est légitime, une éviction mal formulée ou transmise hors délai peut être rejetée. D’où l’importance de documenter chaque étape et, au besoin, de consulter un conseiller juridique ou un professionnel de la gestion immobilière.
Indemnités à verser au locataire évincé
Lors d’une éviction de locataire autorisée par la loi, le propriétaire a l’obligation de verser une indemnité compensatoire. Ce montant vise à couvrir les désagréments liés au déménagement et à la perte du logement.
Conformément aux règles du Tribunal administratif du logement, le propriétaire doit verser au locataire évincé :
- une indemnité équivalente à 3 mois de loyer ;
- le remboursement des frais raisonnables de déménagement.
Ce montant peut être plus élevé si le locataire subit un préjudice particulier ou si une entente entre les parties le prévoit.
Le versement doit être effectué au plus tard à la fin du bail, sauf si une entente précise un autre échéancier. Le non-paiement peut entraîner l’annulation de l’éviction ou une réclamation judiciaire.
Cas particuliers à connaître
Certains profils de locataires ou types d’immeubles exigent une attention particulière lors d’une éviction de locataires. Ne pas en tenir compte pourrait rendre la procédure invalide ou entraîner des conséquences juridiques.
Locataires âgés protégés
Un locataire bénéficie d’une protection spéciale contre l’éviction si ces trois conditions sont réunies :
- Il est âgé de 65 ans ou plus.
- Il habite le logement depuis au moins 10 ans.
- Il a un revenu modeste.
Dans ce cas, le propriétaire ne peut pas procéder à l’éviction, sauf s’il est en mesure de reloger le locataire dans un logement équivalent, dans le même secteur, à un loyer comparable.
Copropriétés et immeubles en société
- Pour les immeubles détenus en copropriété ou en société, le motif d’éviction doit être attribuable à l’ensemble des copropriétaires ou à l’usage collectif du bien.
- Les démarches doivent être bien coordonnées, avec preuves documentées à l’appui.
Attention aux baux renouvelés automatiquement
- Dans le cas des baux à durée indéterminée ou renouvelés tacitement, le respect des délais d’avis reste obligatoire.
- Un oubli dans l’échéancier peut retarder l’éviction de plusieurs mois.
(source : Educaloi)
Éviction de locataires : les bonnes pratiques pour les propriétaires et gestionnaires
Même lorsqu’une éviction est possible, il est important de rester rigoureux et respectueux pour éviter les conflits, rester conforme à la loi et préserver de bonnes relations.
Voici quelques bonnes pratiques à adopter :
1. Planifier les projets à l’avance
Avant d’envisager une éviction, assurez-vous de bien connaître les délais légaux, les périodes de renouvellement de bail, et les impacts du moratoire en vigueur. Une bonne planification permet d’éviter des refus ou des pertes de temps
2. Documenter toutes les démarches
Conservez une trace écrite de chaque étape : avis d’éviction, preuve de remise, échanges avec le locataire, projet immobilier, autorisations de la municipalité, etc. En cas de litige, ces documents seront essentiels.
3. Prioriser une communication claire et respectueuse
Un locataire bien informé est plus enclin à collaborer. Expliquer votre projet avec transparence peut réduire les tensions et faciliter les négociations.
4. S’entourer de professionnels
Consulter un avocat spécialisé peut faire toute la différence. Une éviction mal encadrée peut mener à des refus, des indemnités plus élevées ou des procédures longues devant le TAL.
Hopem: des solutions sur mesure pour les gestionnaires immobiliers
Hopem est une entreprise québécoise spécialisée en développement de solutions logicielles pour le secteur immobilier.
Grâce à ses outils technologiques performants, Hopem aide les gestionnaires immobiliers, propriétaires d’immeubles et organisations du domaine locatif à simplifier la gestion des baux, faciliter les processus administratifs et assurer un meilleur suivi des obligations légales.