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Loi 31 au Québec : Impacts et obligations pour les propriétaires

Adopté en 2024, le projet de Loi 31 apporte des changements majeurs pour les propriétaires d’immeubles à logements au Québec, notamment en ce qui concerne la cession de bail, la sous-location, l’éviction et la gestion des baux.

Voici tout ce que vous devez savoir pour gérer vos logements en toute conformité.

Qu’est-ce que la Loi 31 ?

Adoptée au Québec en 2024, la Loi 31 apporte des changements importants au droit locatif et impacte autant les propriétaires que les locataires. Son objectif ? Moderniser les règles du logement, encadrer certaines pratiques abusives et mieux équilibrer les droits et responsabilités des deux parties.

Le gouvernement du Québec a introduit la Loi 31 afin de :

  • Faciliter la gestion des logements locatifs pour les propriétaires.
  • Contrôler la cession de bail et la sous-location afin d’éviter les abus.
  • Renforcer les droits des locataires en matière d’éviction et de salubrité des logements.
  • Accroître les pouvoirs des municipalités pour favoriser la construction de logements abordables.

Qui est concerné par la Loi 31 ?

Cette loi affecte tous les acteurs du marché locatif, notamment :

  • Les propriétaires de logements locatifs qui doivent s’adapter aux nouvelles règles de cession de bail, d’éviction et de salubrité.
  • Les locataires qui bénéficient de nouvelles protections, mais voient leurs possibilités de sous-location et de cession de bail restreintes.
  • Le Tribunal administratif du logement (TAL) qui voit son champ de compétence élargi et ses pouvoirs renforcés.
  • Les municipalités qui disposent de nouveaux leviers pour encadrer le développement immobilier.

Le projet de Loi 31 représente un vrai tournant pour le marché locatif québécois. Pour les propriétaires et gestionnaires immobiliers, bien comprendre ces nouvelles règles est essentiel pour assurer une gestion conforme et éviter les conflits.

Location et gestion des baux

La Loi 31 introduit plusieurs modifications importantes en matière de gestion des baux. Ces ajustements visent à donner plus de contrôle aux propriétaires tout en limitant certaines pratiques jugées abusives par le gouvernement.

Cession de bail : Quels changements pour les propriétaires ?

La cession de bail permettait auparavant aux locataires de transférer leur bail à une autre personne, souvent sans que le propriétaire puisse s’y opposer. Avec la Loi 31, cette pratique est désormais.

Ce qui change avec la Loi 31

  • Les propriétaires peuvent refuser une cession de bail sans motif sérieux, à condition de libérer le locataire de ses obligations.
  • Les locataires ne peuvent plus exiger de compensation financière en échange d’une cession de bail.
  • Les délais de traitement restent les mêmes : le propriétaire a 15 jours pour répondre à une demande de cession, après quoi celle-ci est automatiquement acceptée.

Sous-location : Encadrement plus strict pour éviter les abus

La sous-location permet à un locataire de louer temporairement son logement à une autre personne. Cependant, cette pratique a souvent été détournée pour faire des profits, notamment avec les plateformes de location à court terme comme Airbnb.

Ce qui change avec le projet de Loi 31

  • Interdiction formelle pour un locataire de sous-louer à un prix supérieur à son propre loyer.
  • Renforcement des règles pour les sous-locations de plus de 12 mois ; ces dernières nécessitent désormais une approbation explicite du propriétaire.

Ces nouvelles règles empêchent les locataires de profiter du marché locatif à des fins spéculatives et offrent aux propriétaires plus de transparence sur l’usage de leurs logements. En cas de sous-location illégale, les propriétaires peuvent désormais agir plus rapidement pour faire respecter les règles.

Modifications des clauses du bail

Des changements sur les informations obligatoires à inscrire dans le bail ont également été apportés, notamment les clauses G et F, qui influencent directement la transparence des loyers.

Clause G : Transparence sur l’historique des loyers

  • Les propriétaires doivent désormais indiquer le loyer le plus bas payé au cours des 12 derniers mois sur le bail.
  • Cette mesure vise à éviter des augmentations de loyer abusives et à permettre aux locataires de contester une hausse.
  • Un propriétaire qui omet intentionnellement cette information peut être sanctionné par le Tribunal administratif du logement (TAL).

À noter : cette obligation ne s’applique pas aux logements construits, loués ou occupés depuis moins de cinq ans, sauf si un bail précédent a déjà été signé pour le même logement. (source : TAL)

Clause F : Encadrement des nouveaux immeubles

  • Dans les immeubles de moins de 5 ans, le bail doit préciser le loyer maximal prévu pour les cinq prochaines années.
  • Cette règle permet aux locataires de mieux anticiper l’évolution de leur loyer et d’éviter des hausses imprévisibles.

Ces nouvelles obligations nécessitent plus de rigueur administrative, mais elles visent aussi à rendre le marché locatif plus transparent.

Éviction et reprise de logement : Ce qui change pour les propriétaires

Cette réforme redéfinit aussi les règles entourant l’éviction et la reprise de logement afin de renforcer la protection des locataires tout en ajoutant de nouvelles obligations aux propriétaires.

Petite mise au point terminologique :

  • ​​​Éviction : utilisée lorsqu’un propriétaire souhaite reprendre le logement pour y effectuer des travaux majeurs, comme la démolition, la transformation ou l’agrandissement du bâtiment.
  • Reprise de logement : vise les cas où le propriétaire souhaite reprendre le logement pour l’habiter lui-même ou y loger un membre de sa famille proche.

Indemnisation obligatoire des locataires évincés

Avec la Loi 31, les propriétaires qui évinceraient un locataire pour reprise de logement ou pour des travaux majeurs nécessitant une évacuation doivent désormais verser une indemnisation obligatoire.

Pour les avis d’éviction transmis le 21 février 2024 ou après, l’indemnité est calculée en fonction de la durée d’occupation du locataire :​

  • Trois ans ou moins : indemnité équivalente à trois mois de loyer.​
  • Plus de trois ans : indemnité équivalente à un mois de loyer par année de location ininterrompue, avec un plafond de 24 mois.

De plus, le propriétaire doit couvrir les frais raisonnables de déménagement du locataire.​

Des protections supplémentaires existent pour les locataires âgés de 65 ans ou plus qui occupent le logement depuis au moins 10 ans et qui ont un revenu égal ou inférieur à 125 % du revenu admissible à un logement à loyer modique.

Cette mesure vise à limiter les évictions abusives et à offrir aux locataires le temps et les moyens de se reloger dans un contexte où l’accès au logement est de plus en plus difficile.

(Source : https://educaloi.qc.ca/capsules/eviction-du-logement/)

Le propriétaire doit prouver la légitimité de l’éviction (fardeau de la preuve inversé)

Avant la Loi 31, c’était souvent le locataire qui devait démontrer que son éviction était injustifiée ou frauduleuse.

Désormais, la situation est inversée :

  • Le propriétaire a l’obligation de prouver que son éviction est légitime et conforme aux règles.
  • Une preuve de la réalisation du projet (travaux majeurs, reprise pour un membre de la famille) peut être exigée.
  • Des sanctions peuvent être imposées si l’éviction est jugée abusive ou frauduleuse.

Sécurité et salubrité des logements : Responsabilités accrues des propriétaires

Les propriétaires ont désormais une plus grande responsabilité quant à l’entretien et la salubrité des logements. Ils doivent s’assurer que leurs immeubles respectent les normes d’habitabilité, notamment en matière de chauffage, de ventilation, d’infestation et d’entretien général.

Si un logement est jugé impropre à l’habitation en raison de la négligence du propriétaire, le locataire peut désormais réclamer des dommages-intérêts punitifs en plus des compensations habituelles.

Changements dans les procédures judiciaires et administratives

Avec la Loi 31, les procédures devant le Tribunal administratif du logement (TAL) évoluent pour offrir plus de flexibilité. Les propriétaires et locataires peuvent se faire représenter par la personne de leur choix, sous certaines conditions.

De plus, la compétence du TAL a été élargie, lui permettant désormais de traiter des litiges jusqu’à 100 000 $, comparativement à 85 000 $ auparavant. Cette augmentation vise à mieux encadrer les différends liés aux baux résidentiels et à éviter le recours aux tribunaux civils pour des montants plus élevés.

Comment les propriétaires peuvent-ils s’adapter à la Loi 31 ?

Avec les nombreux changements apportés par la Loi 31, les propriétaires doivent ajuster leur gestion locative pour rester conformes aux nouvelles règles et éviter d’éventuels litiges.

Voici quelques bonnes pratiques à adopter :

  • Se familiariser avec les nouvelles obligations : Comprendre les nouvelles règles sur la cession de bail, la sous-location, l’éviction et la gestion des baux.
  • Anticiper les coûts liés aux évictions et aux travaux : Prendre en compte l’indemnisation des locataires et bien planifier les projets de rénovation.
  • S’assurer de la conformité des baux : Vérifier que toutes les informations requises (clause G et F, entre autres) sont bien indiquées pour éviter des contestations.
  • Maintenir des logements salubres et sécuritaires : Prévenir tout risque de litige en répondant rapidement aux plaintes et en assurant un entretien rigoureux des logements.
  • Consulter des experts en droit locatif : En cas de doute ou de situation complexe, faire appel à un avocat ou un gestionnaire immobilier spécialisé pour éviter des erreurs coûteuses.
  • Suivre l’évolution des lois et des décisions du TAL : Se tenir informé des changements futurs et des interprétations légales pour mieux anticiper les ajustements nécessaires.

En adaptant leurs pratiques dès maintenant, les propriétaires pourront minimiser les risques de litiges et assurer une gestion efficace et conforme de leurs logements.